"La nouvelle législation européenne doit éviter les abus comme celui que ma famille a subi"
En mars 2016, Bertha Càceres a été abattue dans sa maison de La Esperanza (Honduras) en raison du rôle de premier plan qu'elle a joué dans la lutte du peuple indigène hondurien Lenca pour protéger ses terres d'un projet de barrage hydroélectrique qui les aurait privés de leur territoire et patrimoine. L'investissement, mené par un consortium de bailleurs de fonds internationaux, s'était heurté à l'opposition du peuple Lenca depuis sa création et a été violemment et illégalement réalisé avec le soutien du gouvernement hondurien. L'entreprise responsable du projet avait en effet ignoré les normes internationales des droits de l'homme et n'avait pas consulté les communautés autochtones, tout en recourant à la violence mortelle face à l'opposition.
Hier, la fille de Berta Càceres, Bertha Zùniga Càceres, directrice exécutive du COPINH, écrit aux commissaires européens, Thierry Breton (Commissaire au Marché Intérieur) et Didier Reynders (Commissaire à la Justice) sur la future directive sur la gouvernance d'entreprise durable. Elle leur a demandé "pour s'assurer que la législation est solide et efficace, afin d'empêcher les violations brutales des droits de l'homme par les entreprises, comme ce que ma famille a vécu. »
La lutte du peuple Lenca, de Bertha et de sa fille, n'est qu'un exemple de la lutte quotidienne des communautés indigènes et paysannes pour protéger la terre, les sources d'eau, les forêts et notre famille humaine des impacts négatifs des activités des entreprises. La prochaine proposition de gouvernance d'entreprise durable pourrait changer la donne pour les communautés confrontées à des abus d'entreprise dans le monde entier. Pour que cela se produise, la loi doit garantir de solides obligations de diligence raisonnable, une consultation avec les communautés locales, des protections contre les représailles et des dispositions strictes sur l'accès aux recours et à la justice.
La Directive sur la gouvernance d'entreprise durable, qui devrait être déposé par la Commission européenne en décembre, contiendra des dispositions sur les droits de l'homme obligatoires et la diligence raisonnable environnementale pour les entreprises basées et opérant en Europe. Cependant, on ne sait pas dans quelle mesure la loi s'attaquera efficacement aux obstacles auxquels les communautés et les peuples autochtones sont confrontés pour accéder à la justice pour les dommages causés par les activités commerciales.
La lettre de Bertha Zùniga vient après les défenseurs des droits humains et de l'environnement Ester Kiobel et Saïda Khatoon a écrit aux commissaires Reynders et Breton pour demander que la prochaine proposition législative européenne comprenne des dispositions strictes sur l'accès à la justice pour les personnes touchées par les abus des entreprises. Nous espérons que leurs voix, s'exprimant également au nom de nombreuses communautés, seront entendues.